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  • marlenepineau

Des parcours de lecture dans Montaigne

Synthèse sur les deux essais de Montaigne

DÉFINITION d'un ESSAI

En littérature, un essai est une œuvre de réflexion portant sur les sujets les plus divers et exposée de manière personnelle, voire subjective par l'auteur. Contrairement à l'étude, l'essai peut être polémique ou partisan. C'est un texte littéraire qui se prête bien à la réflexion philosophique, mais aussi à d'autres domaines : essais historiques, essais scientifiques, essais politiques, etc. L'auteur d’un essai est appelé « essayiste ». Le terme « essai » est dérivé du latin exagium, « juger, examiner, peser ». (wikipedia)

Les caractéristiques de la pensée humaniste

« Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne m'est étranger. »

«Homo sum: humani nihil a me alienum puto.» Térence.

Devise inscrite au plafond de la « librairie » de Montaigne.

a) une comparaison avec un élément appartenant à la culture de l’Antiquité, à la culture de la Bible

Montaigne utilise dans son livre les Essais, les connaissances liées à l’Antiquité. Il montre que le « nouveau monde » n’est pas l’Atlantide, comme l’espéraient beaucoup d’auteurs. Il raconte donc l’histoire du Déluge qui aurait inondé et englouti l’Atlantide, « Platon fait dire à Solon […] la ville de Saïs en Egypte que, autrefois et avant le Déluge, il y avait une grande île, nommée Atlantide » (l.23-24, p.49). L’analogie se fait donc entre la nouvelle terre découverte et la légende de l’Atlantide qui a été répandue durant l’Antiquité.

b) une comparaison avec un élément appartenant à l’expérience personnelle de Montaigne

« des cannibales » « Quand je considère l’empreinte que ma rivière de Dordogne laisse, de mon vivant […], je vois bien que c’est là un mouvement qui n’est pas ordinaire. » (l.60 à 64, p52)

Montaigne parle de sa région et de la rivière qu’il connaît bien, la Dordogne qui a changé de cours au fil des années , il évoque ainsi ses souvenirs personnels en utilisant « je » et des adjectifs possessifs.

« des coches » « Moi-même, qui suis fort sujet à ce malaise, je sais bien que cette cause ne joue pas sur moi, et je le sais non pas par un argument, mais en vertu d’une indiscutable expérience (l.24 à 27, p95) Montaigne évoque son mal de mer

« La peur naît parfois d’un manque de jugement, ou d’un manque de courage. Tous les dangers que j’ai vus, cela a été les yeux ouverts, la vue claire, saine et entière ; même dans la crainte, il faut du courage. » (l.37 à 40, p95)

Montaigne utilise son expérience personnelle pour en tirer des vérités, c’est l’étude de soi, une caractéristique principale de l’humanisme

c) la marque d’un ton humain, familier, proche de l’humour, plein d’affection

« mes cannibales » =les cannibales dont j’ai déjà parlé et non ceux dont parlent les géographes

« revenons à nos coches »

« tout cela n’est pas si mal » est une litote : =atténuation pour dire : « tout cela est très bien », Montaigne se montre réducteur envers toutes les prouesses des amérindiens (force, sagesse, capable de créer une cohésion) alors qu’en réalité il est très admiratif, c’est donc une phrase ironique car il affectionne énormément les indiens d’Amérique.

« mais quoi, ils ne portent point de haut-de-chausses ! » est une blague de Montaigne, par cette exclamation, il feint de mépriser des amérindiens car ils n’ont pas l’apparence des aristocrates européens.

La démarche anthropologique de Montaigne

a) exemples de coutumes décrites avec précision lignes 274 à 297, pages 69 et 71

b) deux témoignages de personnes d’identité très différente.

Le témoignage d’un Européen « J'ai eu longtemps avec moi un homme qui avait demeuré dix ou douze ans en cet autre monde, qui a été découvert en notre siècle, en l'endroit où Villegagnon prit terre, qu'il surnomma la France Antarctique. » lignes 109-111 page 55« il faut disposer comme témoin, soit d'un homme dont la mémoire soit très fidèle, soit d'un homme si simple qu'il ne puisse trouver lui-même de quoi bâtir et donner de la vraisemblance à des inventions fallacieuses, et qui n'ait là-dessus aucun préjugé. C'était le cas du mien : et pourtant, il m'a fait voir à plusieurs reprises des matelots et des marchands qu'il avait connus pendant son voyage. »« Des cannibales » lignes 12-13 p 47

Le témoignage d’Amérindiens « Trois d'entre eux […] vinrent à Rouen, au moment où le défunt roi Charles IX y était. Le Roi leur parla longtemps ; on leur fit voir nos manières, nos fastes, ce que c’est qu’une belle ville. Après cela, quelqu'un leur demanda ce qu’ils en pensaient, et voulut savoir d'eux ce qu'ils y avaient trouvé de plus admirable ; ils répondirent trois choses _ j’ai oublié la troisième et j’en suis bien contrarié ; mais j'en ai encore deux en mémoire. »« Des cannibales» pages 85 – 87 (lignes 490- 514)

Le témoignage des conquistadores : « C’est d’eux-mêmes que nous tenons ces récits ; car non seulement ils les avouent, mais ils s’en vantent et les prônent. »« Des coches » lignes 637-639 p 139

les verbes employés montrent que Montaigne condamne les comportements des Européens.

Idéalisation du monde naturel : un plaidoyer pour l’humanité sauvage

a) des qualités morales des Amérindiens

Les 2 choses que les indigènes estiment le plus sont le courage et l’attachement aux femmes

« la vaillance contre les ennemis et l’amour pour leurs femmes »l 264, p 65 ; p67 (lignes 252-254) p127 (lignes 463-467) Montaigne met en avant le courage des indigènes. un rythme binaire: « quant à la hardiesse et au courage » l463 ; une énumération : « quant à la fermeté, à la constance, à la résolution contre les douleurs, la faim et la mort » l463-465. une négation : « Je ne craindrais pas » l465., une comparaison entre les héros de l’Antiquité et les indigènes pour valoriser ces derniers : « confronter les exemples que je trouverais chez eux aux plus fameux exemples de l’Antiquité que l’on retrouve dans les histoires de notre monde » l465-467.

b) des qualités propres aux cultures et civilisations amérindiennes

« des espèces de prêtres et de prophètes qui se montrent rarement au peuple » p 67,religion personnelle, intime, authentique

« quand ils arrivent, on organise une grande fête et une assemblée solennelle de plusieurs villages » p 67grande piété et valeur essentielle de la religion qui est de fonder un lien social (étymologie possible du terme « religion » = relier )

« Des Cannibales » :p85 (lignes 484-489) : Montaigne fait l’éloge de la langue des indigènes, il la trouve douce et la rapproche même de la langue grecque.

« Des Coches » :p127(ligne 451-459) : Description de la beauté des villes du monde indigène (Cuzco et Mexico) avec leurs jardins. Le talent des indigènes dans la peinture, leurs ouvrages de pierreries, plumes et coton...

c) des références à la nature pour faire l’éloge du monde amérindien.

« ils vivent dans un pays très agréable et bien tempéré » « il est rare d’y voir un homme malade »p 63

la comparaison entre le peuple amérindien et un enfant proche de sa mère nature : « il [le peuple amérindien] était encore tout nu dans le giron de sa mère nourricière [= la nature] et ne vivait que des ressources qu’elle lui fournissait » l 436 p 125

Blâme de la civilisation européenne : un réquisitoire

a) des passages qui évoquent des faits particulièrement violents.

b) des passages où Montaigne dénonce la manipulation des Amérindiens par les Européens.

p 137 « « on machina contre lui une accusation avec de fausses preuves »

« ceux qui les ont subjugués suppriment les ruses et les tours de passe-passe dont ils se sont servis pour les tromper. »(p 127, l 467-469)

« que s’ils voulaient se soumettre à lui en lui payant tribut, on les traiterait bien gentiment ; ils leur demandaient des vivres, pour se nourrir et de l’or dont ils avaient besoin pour quelque médicament »(p 133, l 541-544)

l.535-547 p 133 discours indirect des Européens, plein de fausse naïveté, de mensonge et d’hypocrisie

c) des passages où Montaigne emploie le pronom « nous » pour désigner notre identité européenne, notre responsabilité, notre culpabilité à l’égard des Amérindiens.

lignes 297 à 315, page 71 : l’allusion à l’atrocité des guerres de religion en France dont Montaigne est le témoin direct

« ils avaient remarqué qu’il y avait parmi nous des hommes repus et gorgés de tout sortes de commodités, et que ceux qui étaient la « moitié » d’eux mendiaient »(p 87, l 508-510). Dans ce premier extrait, Montaigne utilise le terme « nous » pour désigner notre identité européenne.

« Mais quant à la piété, au respect des lois, à la bonté, la libéralité, la loyauté, la franchise, il nous a été bien utile de ne pas en avoir autant qu’eux : par cet avantage qu’ils avaient sur nous ils se sont perdus, et vendus, et trahis eux-même. »(p 127, l 459-464) Montaigne a employé le terme « nous » pour notre responsabilité européenne et pour attiser notre culpabilité envers les Amérindiens.

II. DES QUESTIONS DE DISSERTATION

1. Le regard de Montaigne sur l’être humain est-il pessimiste ou optimiste ?

I. Le pessimisme de Montaigne (vision négative du monde et de l’humanité, sans grand espoir) A Une époque de guerres et de violence

exemple condamnation de la cupidité des Européens ( p 133)

B L’échelle des barbaries

exemple : la torture pratiquée par les Portugais plus cruelle que les coutumes amérindiennes

C La déraison des préjugés et la prétention dangereuse du savoir et de la connaissance

la dénonciation de cette faiblesse du jugement par le changement de point de vue, le décentrement

II. L’optimisme de Montaigne (vision positive du monde et de l’humanité, avec espoir) A-L’observation de civilisations idéales : l’antiquité, les peuples amérindiens

l’éloge du monde naturel et des vertus morales

B-la foi humaniste en l’homme :

l’intention des Essais, dans « l’avis au lecteur », à la fois intime et publique : une quête d’authenticité

C- une méthode pour penser : la comparaison, l’analogie, la curiosité à l’égard des différences suivant l’idée que« rien de ce qui est humain ne m’est étranger » la démarche objective de l’anthropologue, l’intérêt pour l’altérité : replacer le cannibalisme dans une étude de coutumes humaines

Exemple de conclusion rédigée

Il est difficile de trancher entre pessimisme et optimisme, dans la mesure où le regard de Montaigne pose un regard authentique et indigné sur les réalités atroces de son temps mais cette observation pleine d’humanité et de lucidité sur les comportements humains est la preuve d’une sagesse qui nous touche encore au XXIème siècle et nous donne un espoir en notre capacité à réfléchir et donc à agir sur nos propres dérives. Montaigne nous montre les hommes aux prises avec les tourments de l’Histoire collective.

Ouverture possible sur une lecture cursive

C’est vraisemblablement une énergie de cette nature qui mène tout auteur en littérature d’idées, à quelque nuance près. Ainsi un modeste roman graphique comme Un maillot pour l’Algérie de Rey, Galic et Kris témoigne lui aussi de cette forte ambition en retraçant le rôle de l’équipe de football algérienne au moment de l’indépendance : c’est l’humanité des hommes qui fait la grande histoire.

Ouverture possible sur un texte étudié en classe

La vision très humaniste de Montaigne et son intérêt pour les peuples d’Amérique nous permettent de comparer ses Essais aux Entretiens sur la pluralité des mondes de Fontenelle qui propose lui aussi une réflexion sur l’homme à partir de la découverte du Nouveau Monde : il fait preuve comme Montaigne d’un certain optimisme dans les découvertes toujours possibles et comme Montaigne, il demande de tenir compte de l’ignorance humaine comme un fait premier et incontournable.

Ouverture possible sur une autre lecture cursive

Voltaire procède de la même façon dans l'Ingénu et le traitement plein d'humour de faits sociaux et politiques souvent bien sombres confère à son conte philosophique une tonalité optimiste.

2. Peut-on, selon Montaigne, acquérir une connaissance de l’être humain en général ?

autre formulation voisine

Les réflexions de Montaigne sont-elles partiales, subjectives ou ouvrent-elles l’accès à une réflexion objective ?

I. Au premier abord, la connaissance de l’être humain que propose Montaigne est partielle, morcelée, circonstancielle, subjective

A. Montaigne relève des faits éparpillés, des épisodes isolés, relevant de circonstances contemporaines ou d'une érudition en lien avec l'Antiquité. Son écriture est décousue, semble peu ordonnée : il écrit « par sauts et à gambades »

exemple : relation entre le titre « des coches » et la composition de cet essai

exemple : la torture du roi du Pérou p 137, la torture du roi de Mexico p 139

B. Montaigne fonde sa réflexion sur l’observation de sa propre personne et de son expérience singulière, particulière .L'implication personnelle dans le propos

exemple : « l’avis au lecteur » l’intention des essais est de parler de soi à ses proches il évoque des anecdotes personnelles comme son mal des transports dans « des Coches »

« des cannibales » (l.60 à 64, p52) ; « des coches » (l.24 à 27, p95)

C. Le ton de la conviction personnelle : éloge, indignation

éloge : la splendeur et les qualités morale du monde enfant l 444 467 p 127

indignation devant la cruauté et la barbarie des Européens "des coches", l.639-658 p 139-141

II. Mais Montaigne construit ainsi une connaissance de l’être humain en général A. Montaigne propose une méthode pour penser : la comparaison, l’analogie, la curiosité à l’égard des différences suivant l’idée que« rien de ce qui est humain ne m’est étranger » la démarche objective de l’anthropologue

exemple : les rituels cannibales et la comparaison avec diverses causes du cannibalisme (les Scythes)

B. Montaigne a un modèle idéal, valable pour tous les hommes selon lui, dont il se sert comme mesure pour évaluer et condamner l’inhumanité de certains comportements humain. Cet idéal est souvent associé à l’antiquité, mais il se retrouve également dans la présentation du monde sauvage, naturel avant l’arrivée des Conquistadores

exemples : antiquité p 131 ligne 507 ; amérindiens : p 127

C Son écriture témoigne d’une sagesse intemporelle qui nous donne des leçons encore valables au XXIème siècle. Le pronom « nous » renvoie aux Européens de l’époque mais souvent à nous , lecteurs du XXIème siècle. Et le présent de vérité générale nous concerne également.

exemple : les propos tenus sur l’importance de l’ignorance, et le refus de l’ethnocentrisme p123

Exemple de conclusion rédigée

L’oeuvre de Montaigne surprend par son aspect décousu et le nombre de petits détails et d’anecdotes personnelles dont elle fourmille c’est également ce qui fait sa valeur et sa sagesse : sur cette multiplicité, cette grande variété de la pensée se construit une vision humaniste pleine de tolérance, de curiosité et d’émotions sur les possibles et les dangers de l’existence humaine.

Il faut bien toute cette énergie pour affronter les questions angoissantes que l’humanité continue à affronter siècle après siècle. Les argumentations du XXIème siècle poursuivent cet intérêt tenace pour l’être humain aux prises avec des difficultés de l’existence et certains auteurs modernes incitent à réfléchir, comme Montaigne, en proposant une réflexion générale à partir de leur cas particulier :

Ouverture possible sur des lectures cursives

ainsi, Edouard Louis, dans Qui a tué mon père examine la condition des ouvriers brisés par une vie de travail en observant sa propre famille.

Joseph Shovanec, dans son essai Je suis à l’est, à partir d’une réflexion sur son autisme, nous incite à repenser aux règles sociales et à l’hypocrisie qui en découle, au-delà du seul handicap.

le pédopsychiatre Marcel Rufo, dans son essai Ces émotions sportives qui nous font grandir, observe comment se construit la connaissance de soi à partir d'épisodes très ordinaires liés aux pratiques sportives à l'adolescence.

On retrouve cette capacité à mêler grande histoire et témoignage personnel dans le roman graphique L'enragé du ciel de Joseph Safieddine et Loïc Guyon qui retrace la vie téméraire de Roger Henrard un photographe aérien dans la première moitié du XXème siècle.

On retrouve cette capacité à mêler observation anthropologique et témoignage personnel dans le roman graphique Le gout d'Emma d' Emmanuelle Maisonneuve et Kan Takahama qui retrace les efforts de la jeune femme pour se faire accepter dans le milieu très masculin de la critique culinaire.

3 Les réflexions de Montaigne sont-elles datées ou peuvent-elles encore être d’actualité ?

I. Une réflexion datée

A. Un contexte politique révolu : la monarchie, le poids de la religion

et des faits historiques appartenant au passé : la colonisation d’un continent, considérée comme un possible bienfait et dénoncée dans ses abus

références à exploiter p 125, 131 l. 509-510, p 133

B. Une écriture typique du XVIème siècle : l’érudition humaniste et l’admiration absolue pour les civilisations greco-romaines

le recours aux langues anciennes, soit sous forme de citations en langue originale soit sous la forme de références érudites

exemple de référence rédigée : Dans l’essai « Des Coches » (p 131) Montaigne regrette que les Amérindiens n’aient pas été découverts et colonisés par des Grecs et des Romains, dans l’idée que ces derniers auraient éduqué les Indiens au lieu de les massacrer. Montaigne semble oublier que le mot ‘barbare » inventé par les Grecs servait également à exprimer du mépris ethnocentrique et à justifier des conquêtes dans l’Antiquité.

C Un langage qui appartient à une époque très précise (paragraphe rédigé)

La langue de Montaigne nécessite par ses tournures anciennes, d'être retranscrite. Montaigne écrit lui-même dans l'avis au lecteur : « Je n’écris pas pour les siècles à venir, mais pour mes proches. »

Dans l’essai « De la vanité » on retrouve une idée semblable :« J’écris mon livre à peu d’hommes, et à peu d’années. Il explique que cette postérité limitée de son oeuvre est due à la langue qui se modifie et risque de ne plus être compréhensible : "Selon la variation continuelle, qui a suivi le nôtre jusques à cette heure, qui peut espérer que sa forme présente soit en usage, d’ici à cinquante ans ? Il écoule tous les jours de nos mains : et depuis que je vis, s’est altéré de moitié. "

Montaigne a vu sa langue se transformer au cours de sa vie. Il sait que les mots dans lesquels il s’exprime seront bientôt méconnaissables. Stendhal, à l'inverse faisait en 1830 le pari qu’on le lirait en 1880 ou en 1930, après un demi-siècle ou même un siècle. Rien de tel chez Montaigne, qui imagine qu'on ne le lira pas longtemps, tellement la langue aura changé.

Il s'est trompé sur ce point, car ses réflexions nous touchent et nous concernent et malgré les difficultés de la langue, nous le lisons encore .

II. Une réflexion toujours d’actualité

A. La dénonciation des préjugés et la curiosité pour l’altérité : se décentrer, adopter le point de vue de l’autre

B. La prise en compte de l’ignorance comme une vertu authentique et la dénonciation des abus liés à la prétention (connaissances, savoirs techniques) et à l’ethnocentrisme

C. Raisonner en comparant : objectivité de la démarche anthropologique ; partir de soi, d'un cas particulier pour parler des hommes en général

Exemple de conclusion rédigée

Il est bien sûr difficile d’oublier que Montaigne écrit au XVIème siècle, dans la mesure où notre monde a bien changé et les façon de s’exprimer également. Toutefois, il est frappant de constater combien les réflexions de Montaigne sur sa réalité d’un siècle lointain assènent encore leur poids de vérité sur l’humanité complexe qui est la nôtre. A-t-on réellement fait des progrès dans la façon de considérer et de respecter autrui ? Ne commettons pas toujours des erreurs dangereuses en terme d’humanité et même désormais en terme de sauvegarde de la planète entière ? Montaigne nous éclaire encore de sa grande lucidité sur des questions qui demeurent posées.

Ouverture possible sur une lecture cursive

"Parce que c'était lui ; parce que c'était moi" écrivait-il ainsi pour tenter de saisir l’intensité d’une amitié qui le lia à Etienne de La Boétie, avant que celui-ci ne meure prématurément. Et c’est encore l’amitié, évoquée par Marie-Jo Bonnet dans son essai Plus forte que la mort, qui aide des détenus à survivre dans les pires conditions au XXème siècle.

Ouverture possible sur une autre lecture cursive

On retrouve dans des essais contemporains cette méthode qui consiste à partir d'un cas, d'un épisode précis et d'en tirer des informations sur toute une société : l'historien Ian Jablonka ne fait pas autre chose lorsqu'il se sert d'un fait divers, l'assassinat de Laetitia Perrais, pour examiner les engrenages sociaux de la violence faite aux femmes dans notre société et des méfaits de la médiatisation au service de la politique.

Ouverture possible sur une autre lecture cursive

On retrouve dans des essais contemporains cette capacité à interroger le présent à l'aide du passé. C'est la force d'une grande intellectuelle comme Germaine Tillion qui dans l'entretien La traversée du mal revient sur son expérience personnelle au contact de la grande histoire, puisqu'elle fut déportée en tant que résistante, puis concernée par la guerre en Algérie en tant qu'ethnologue.

Ouverture possible sur une autre lecture cursive

Des épisodes historiques auront suscité à toutes les époques des productions littéraires qui cherchent à comprendre, à prolonger l'émotion et la mémoire après des événements qui ont bouleversé l'humanité. C'est le cas par exemple d'un roman graphique intitulé Guernica dessiné et écrit par Bruno Loth , qui revient avec réalisme et émotion sur un épisode du siècle dernier.

Ouverture possible sur une autre lecture cursive

On peut se demander quelle postérité attend des ouvrages extrêmement enracinés dans une actualité comme ces romans graphiques qui proposent des reportages précis sur notre société : Chantier interdit au public de Claire Braud paru dans la collection Sociorama en est un bon exemple. Il offre une connaissance ciblée sur une réalité sociologique telle que le travail illégal des étrangers dans le secteur du bâtiment. Dans le même temps il témoigne d'une volonté de s'intéresser à l'altérité ici et maintenant, dans notre quotidien et cette démarche là est intemporelle.

Ouverture possible sur une autre lecture cursive

On peut se demander quelle postérité attend des ouvrages extrêmement enracinés dans une actualité comme ces essais de sociologie qui proposent des reportages précis sur notre société : c’est pourtant le choix que fait le sociologue Pierre Rosanvallon dans une collection consacré aux récits de vie sur lesquels il fonde l’observation de toute une société : La course ou la ville d’Eve Charrin, en est un exemple. Cet ouvrage offre une connaissance ciblée sur une réalité sociologique telle que l’activité de livreur. Dans le même temps il témoigne d'une volonté de s'intéresser à l'altérité ici et maintenant, dans notre quotidien et cette démarche là est intemporelle.

4 Pour défendre sa thèse, Montaigne accorde-t-il une place majeure au discours argumentatif ou dans quelle mesure mêle-t-il les discours (argumentatif, narratif, descriptif) ?

I Les essais, un discours essentiellement argumentatif

A.L'implication personnelle dans le propos : la présence de Montaigne dans ses essais

sujet de son propre livre (cf "l'avis au lecteur") et souvent évoqué à titre d'exemple : « des cannibales » (l.60 à 64, p52) ; « des coches » (l.24 à 27, p95)

B. Le ton de la conviction : éloge, indignation

éloge : la splendeur et les qualités morale du monde enfant l 444 467 p 127

indignation devant la cruauté et la barbarie des Européens "des coches", l.639-658 p 139-141

C. Des thèses fermement défendues

Énoncé de certitudes à l'aide des procédés de l'argumentation (lexique abstrait, présent de vérité générale, pronoms personnels pluriel)

Convictions fortes sur la barbarie, le rôle de l'ignorance et de l'humilité contre les prétentions et l'orgueil liés à l'ethnocentrisme

II La variation des discours

A. des descriptions motivées par l'observation du géographe et de l'anthropologue,

discours descriptif : organisation dans l'espace d'éléments perçus par les sens (le plus souvent visuels, mais également auditifs, etc)

exemple : description des conquistadores vus par les Indiens p 129 l 474-480, les routes entre Quito et Cuzco.

B. des narrations vivantes :

discours narratif : évocation d'actions menées par des personnages dans un espace et une durée donnée (cadre spatio-temporel).

Dans les Essais, importance des récits, des épisodes dramatiques illustrant la thèse et créant des effets intenses dans l'argumentation : favorise la persuasion (usage des émotions) au service de la conviction (usage d'arguments)

Exemple de conclusion rédigée

Les Essais de Montaigne constituent une oeuvre composite où se mêlent divers discours, même si leur visée et leur forme restent essentiellement argumentatives, on voit l'efficacité des discours descriptifs et narratifs au service des thèses défendues.

Ouverture possible sur une lecture cursive

De la même façon l'anthropologue, psychanalyste et philosophe Patrick Declerck choisit le discours narratif pour susciter une réflexion sur l'existence humaine au prise avec une maladie telle qu'une tumeur au cerveau. Le personnage fictif de Crâne est en effet très proche de lui puisque lui-même est victime d’une tumeur au cerveau.

Ouverture possible sur une lecture cursive

De la même façon, Marie-Jo Bonnet dans son essai Plus forte que la mort, insére des séquences narratives dans une réflexion sur le rôle essentiel que joue l'amitié dans la survie des détenus dans les camps de concentration. Ce thème universel avait déjà été évoqué par Montaigne dans ses essais : "Parce que c'était lui ; parce que c'était moi" écrivait-il ainsi pour tenter de saisir l’intensité d’une amitié qui le lia à Etienne de La Boétie, avant que celui-ci ne meure prématurément.

Lexique à maitriser et à employer

altérité

humanisme

abstrait

concret

subjectivité

objectivité

thèse

argument

discours argumentatif

discours descriptif

discours narratif

analogie

ironie

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